Maman a la sclérose en plaques: comment l’expliquer aux enfants?

Comment dois-je aborder le sujet et que dois-je leur dire exactement? Que doivent-ils savoir sur ma maladie?

Ces questions me hantent en permanence. Je n’ai jamais eu l’intention de cacher ma maladie à mes deux filles. Malheureusement, elle fait partie de moi. Cependant, je veux absolument éviter qu’elle leur cause du tort ou prenne trop de place dans leur vie. Je sais qu’il est illusoire de penser que ma maladie n’affectera pas leur vie, mais je ne veux pas qu’elles s’inquiètent. Après tout, je m’efforce de lui laisser le moins de place possible dans ma propre vie. Pourquoi devrait-il en aller autrement pour mes enfants!?

Je leur ai dit la vérité dès le début, quand elles m’ont demandé où j’allais alors que je me rendais à l’hôpital pour passer des examens ou suivre mon traitement. Elles étaient encore petites à l’époque et j’aurais tout aussi bien pu leur raconter que j’allais faire des courses pendant que mamie veillait sur elles, par exemple. Mais c’était hors de question. Chaque fois que je rentrais d’une visite chez le médecin, généralement la première chose qu’elles faisaient était de chercher où on m’avait fait ma prise de sang cette fois.

Au début, nous leur avons simplement dit que j’avais quelques problèmes de santé, ce qui expliquait notamment pourquoi j’étais pratiquement aveugle d’un œil. Encore très jeunes à l’époque, elles s’en sont accommodées sans demander davantage d’explications. Les enfants savent parfaitement vous montrer quand ils sont prêts à recevoir des informations, et surtout à les assimiler. On doit simplement se montrer attentif pour le remarquer.

Aujourd’hui âgées de 8 et 9 ans, nos filles vont à l’école. Ce ne sont plus des bébés. Elles aiment beaucoup l’école, ont de nombreuses sources d’intérêt et se posent beaucoup de questions. S’agissant de ma maladie, le fait de savoir que quelque chose ne tournait pas rond leur suffisait amplement jusqu’ici. Quand l’occasion s’est présentée, j’ai aussi essayé de leur donner quelques explications sur la maladie, mais cela ne les intéressait pas vraiment. J’en suis donc restée là.

Mais au fond de moi, je savais bien qu’un jour il faudrait tout leur dire. Je me suis demandé comment j’allais aborder la question et ce que j’allais leur dire exactement. On dit de cette maladie qu’elle a «d’innombrables facettes». Ce n’est pas un hasard: son évolution est imprévisible. Au début de l’été 2020, la vie a quelque peu repris son cours après la crise du Covid-19. Les enfants pouvaient de nouveau jouer ensemble. C’est là que j’ai pris conscience de la nécessité de mieux informer mes filles sur mon état. Ma fille aînée m’a en effet relaté avoir dit à son amie qu’il valait mieux jouer dehors plutôt qu’à l’intérieur, car maman ne voyant pas bien d’un œil, elle faisait partie des personnes à risque. J’ai dû sourire dans un premier temps, car je trouvais cette vision enfantine attendrissante, mais cela traduisait aussi un besoin d’informations supplémentaires pour éviter qu’elle raconte des choses bizarres malgré elle.

J’ai donc attendu le bon moment pour aborder le sujet en toute tranquillité avec mes filles. Pour commencer, je leur ai montré une petite vidéo trouvée sur Internet où la maladie est expliquée aux enfants. Naturellement, la vidéo ne correspondait pas en tous points à ma situation, mais cela a permis d’établir des bases pour approfondir la question. De plus, je me suis également aidée d’un fil électrique dénudé afin de leur expliquer plus facilement comment la sclérose en plaques attaque la couche isolante (gaine de myéline) des fibres nerveuses. Au-delà du devoir d’information vis-à-vis de mes enfants, je voulais aussi éviter de les inquiéter. Après cette séance, j’ai remarqué que ma fille aînée était particulièrement affectueuse avec moi pendant un certain temps et recherchait plus souvent cette proximité. Mais ma fille étant d’une nature très sensible, cela ne m’a pas étonnée. J’ai aussi tenu à leur dire qu’elles pouvaient me poser toutes les questions qu’elles voulaient quand bon leur semblait, tout en leur rappelant qu’il n’y a pas forcément une réponse claire à chaque question: ni moi ni les médecins n’avons réponse à tout.

Il est injuste que nos filles doivent porter ce fardeau, mais j’espère de tout cœur que ma franchise permettra d’alléger le poids qui pèse sur leurs épaules.

Bien à vous, Gaby