Tu as la sclérose en plaques! J’ai la sclérose en plaques.

Je pense qu’apprendre que l’on a la SEP est une expérience intime pour chacun. Un choc. Un tiraillement entre soulagement de savoir enfin ce qui ne va pas et déception. Colère. J’ai et j’avais, je crois, un peu de toutes les émotions possibles, sauf, et jamais, de découragement.

Saisir et comprendre le diagnostic

Sur le moment, le diagnostic m’a assez secouée. Intérieurement, car j’ai une famille, une responsabilité. Je ne pouvais pas tout lâcher et me laisser aller. En plus, j’avais peur de ne plus jamais pouvoir me relever si je le faisais.
Naturellement, je me sentais physiquement mal, tout à fait à côté de la plaque. Dans cet état, je ne pouvais pas travailler. J’avais des fourmillements partout et je ne dormais pas assez.

Pour me dégager la tête, pour sentir mon corps, j’ai couru, j’ai beaucoup couru. Je ne voulais en aucun cas que la maladie prenne le dessus.

C’est pourquoi j’ai pris le temps de faire tous les tests et les bilans pour pouvoir, bien informée, prendre mes décisions sur la marche à suivre. J’ai fait de ma SEP mon projet.

Le «projet» peut maintenant démarrer. Qu’est-ce que cela signifie en fait avoir la SEP?

Il me fallait pour cela m’informer, en savoir plus et me connaître mieux. Tester aussi mes (nouvelles) limites, surtout physiques… J’ai surfé sur Internet pour écouter et lire comment d’autres personnes avaient réagi au diagnostic, comment elles avaient pris leurs décisions. J’avais besoin d’autant de connaissances rationnelles que possible, ou de témoignages utiles pour pouvoir me réorienter. Car j’avais un corps sur lequel je ne pouvais plus entièrement compter.

J’ai trouvé quelques sources, rares mais bonnes, j’ai commencé à échanger avec d’autres et étais bien heureuse de constater à quoi servent vraiment les échanges : je ne me sentais plus seule. Jusque-là, je ne m’étais pas rendu compte que c’est ce que je ressentais. J’avais ma famille. Mais ce n’est pas la même chose. Si on n’a pas vécu cela, on ne peut pas comprendre que c’est différent de courir ou de faire des randonnées, de cuisiner tranquillement ou de surveiller les devoirs et de ne pas oublier le rendez-vous après. Oui, quelquefois tout est si fatigant.

Ma SEP

Ironie du sort, je travaille depuis 15 ans dans le secteur de la neurologie. J’ai aussi travaillé longtemps avec des personnes atteintes de SEP. Je connais les symptômes, j’en connais les causes possibles, mais je ne les ai pas reconnues chez moi. J’avais même toujours de bonnes excuses quand je ne voyais plus de l’œil droit: la migraine. Cela fait déjà assez longtemps que je ne pouvais plus lever le pied correctement : certainement l’ancienne hernie discale. Les douleurs et engourdissements du bras venaient sûrement de ma chute de vélo il y a quelques années. Ce n’est que maintenant que je peux accepter ces diminutions corporelles et quelques autres comme ce qu’elles sont: la sclérose en plaques et ses symptômes.

Avec mes connaissances neurologiques professionnelles, mon bagage en psychologie et en stratégie de gestion des crises, je devrais être bien armée. Et pourtant, tout cela n’était pas suffisant, car je ne savais pas grand-chose sur le thème «être malade». J’ai souvent du mal à donner un sens à mes symptômes: est-ce seulement une infection qui fait «sonner» la SEP ou bien une poussée.

C’est «comme avant», mais quelquefois un peu autrement

Je dois désormais continuer à m’habituer à cette réalité. J’ai la sclérose en plaques.
Gérer mon énergie serait une bonne approche, mais je ne suis pas (encore) très forte là-dessus. J’aime bien trop la spontanéité et ai beaucoup de petits projets pour la maison et les enfants. Mais là aussi, je rencontre actuellement justement de nombreuses limites physiques. Est-ce donc si difficile de ne pas toujours tout laisser tomber?

J’ai eu au moins une poussée depuis que le diagnostic est tombé. Mais je me laisse encore déstabiliser par ces hauts et ces bas. Chaque jour est différent. En ce moment, divers symptômes s’installent, quelques-uns des anciens reviennent ou disparaissent. Peut-être que c’est ça, ma SEP. Cela ne fait pas assez longtemps que je la connais. Mais comme je ne veux pas m’en occuper maintenant, je vais sortir «prendre mes baskets». Dégager la tête.